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1 mars 2010 1 01 /03 /mars /2010 14:24
Depuis que je fréquente ce monde éditorial, je me sens régulièrement prise entre la chèvre et le chou.
La chèvre : mon admiration pour certains éditeurs qui s'em...nnuient  à donner leur chance aux jeunes auteurs alors que ça ne leur rapporte rien.
La chou : mon incapacité à le leur dire sans avoir l'air de faire du léchage de bottes en bonne et due forme.

Pourtant aujourd'hui, à lire le billet d'un auteur édité, je me dis qu'il faut bien que tout le monde s'exprime. Et tant pis si, à cause de cela je dois passer pour ce que je ne suis pas.
Alors pour dire les choses clairement tout d'abord : je sais que je pourrai faire toutes les courbettes du monde devant les éditeurs, ce n'est pas ça qui leur fera choisir mon manuscrit plutôt qu'un autre. Vous qui me lisez, vous n'en aurez peut-être pas conscience et vous prendrez peut-être ce post pour de la flagornerie mais qu'importe. Les éditeurs ont des amis, des vrais et d'autres qui leur serrent la main à tous les salons tout en serrant les fesses. S'ils devaient tous les publier, les étagères crouleraient sous les livres des incompétents. J'en ai conscience, je sais donc que ce billet ne m'apportera rien... Si ce n'est de me faire détester par une partie des écrivains (les vrais, ceux dont c'est le métier) qui considèrent que les éditeurs les plument.
Mon "article" ne les concerne pas, pourtant. Je ne suis pas dans leur contrat, ni dans la compta des éditeurs. Je ne parle que de ce que je connais : les auteurs débutants et les petits éditeurs/les gros éditeurs qui laissent leur chance aux jeunes auteurs.

Alors, le monde derrière le livre, c'est quoi ?
D'un côté, des gros groupes (que je ne citerai pas) qui ont la main-mise sur tout et entendent garder leur pognon (mais qui ne sont plus guère à l'abri face à des géants comme Amazon ou Google). Bon, Ok, ceux-là, ils tirent du fric.
Dans la même catégorie, il y a les grands auteurs qui s'expriment à la télé sur tout et n'importe quoi, notamment pour nous dire que la crise économique n'existe pas et que tout ça c'est dans la tête (Ok, coco, va donc pointer au chômage avec les gars du secteur industriel et on en reparlera).
Au milieu, il y a le milieu que je ne connais pas.
Et en bas, il y a moi et tous les gens comme moi. Des auteurs en herbe. Quelques bons, une grande majorité de mauvais (et je n'exclus pas d'en faire partie). Que gagne un éditeur à nous laisser notre chance ?
Financièrement ? Rien ! Que dalle ! Peanuts !
Lancer un jeune auteur c'est d'abord lire un millier de manuscrits à peine écrits en français et souvent même pas dans la ligne éditoriale de la boîte pour en trouver un qui peut-être vaudra quelque chose. Mais le "un" en question, c'est une pépite à peine extraite. Je peux vous dire qu'il va falloir du boulot pour en faire un bijou. Des heures de boulot si l'éditeur fait bien son job. Un truc dans lequel l'éditeur se lance sans savoir si le poulain sera conciliant ou s'il sera du genre à se croire trop génial pour changer quoi que ce soit à sa prose.
Une fois qu'on a taillé la pépite. Faut la lancer sur le marché. En face, on a des auteurs classiques dont tout le monde a reconnu les mérites et des blockbusters américains déjà très bien vendus de leur côté de l'océan. Ceux-là vont se vendre comme des petits pains.
Et notre petit auteur en herbe ? Celui qu'on a passé des heures à trouver au milieu du marasme et encore des heures à rendre présentable ? Tout le monde s'en fout.
Son premier livre se vendra mal (ou en tout cas beaucoup moins bien que d'autres livres qui nous ont coûté beaucoup moins d'efforts). On commencera à envisager de rentabiliser tout ça sur le deuxième, le troisième, etc... Sauf qu'une fois sur deux le petit génie qui aura vu que l'écriture ne l'a rendu ni riche ni célèbre alors que ça lui a demandé un travail qu'il n'envisageait pas, n'aura pas la volonté de faire un deuxième roman. Sans compter les retours de critique qui l'auront parfois démoli au point qu'il ne pourra plus écrire.
Et là, l'éditeur aura bossé pour rien.
Alors pourquoi certains éditeurs se donnent-ils ce mal ? Pourquoi, hein ? Je me le demande régulièrement. L'amour du métier, peut-être ? L'intégrité ? Le rêve d'aider d'autres à bâtir leur rêve ?
Une bonne part des éditeurs (ou directeurs de collection) qui font ce travail colossal et absolument pas rémunérateur sont eux-mêmes écrivains (ou bien sont des auteurs qui n'ont jamais atteint ce stade). Peut-on en conclure qu'un élan de solidarité les poussent à donner leur chance aux autres comme eux-mêmes ont eu la leur ?
Je ne sais pas. Je les en remercie, c'est tout. A ceux qui m'ont donné ma chance et à ceux qui ne me la donneront pas parce que je ne l'aurai pas mérité à leurs yeux. Ils ont tous la même valeur pour moi. Ils m'ont ouvert une porte, ils m'ont donné de leur temps et il est précieux.
Ce qu'il y a après, les guerres d'ego, les auteurs reconnus, suffisamment ou insuffisamment payés, je n'en sais rien. Mais quand je lis un jeune auteur qui se plaint de ne pas gagner assez, sachant que lui-même a rapporté encore moins à son éditeur, je me sens le besoin de réagir.
J'ai commencé à écrire en sachant que j'avais 99% de chance de ne jamais rien gagner avec ça. Vous me direz que je peux me le permettre sans doute , Eh bien non. Je dors quatre heures par nuit, je ne regarde pas la télé et ne fais plus de jeux vidéo. Et j'écris parce que j'aime ça. Je pourrais ne voir aucun de mes romans publiés que je continuerais à écrire (j'arrêterais peut-être juste d'encombrer les bureaux des éditeurs avec ma prose).
Je comprends qu'un écrivain reconnu veuille continuer à gagner sa vie grâce à ça. Ce que je ne comprends pas c'est qu'un auteur à peine débarqué et qui ne représente encore rien économiquement vienne tirer sur ceux qui lui ont donné sa chance.
Ça me dépasse, c'est tout.
 

*edit*
Je tiens à préciser que si à l'origine c'est le billet d'un auteur en particulier qui a motivé cet article, ce post vaut pour un comportement que j'ai souvent constaté sur les forums de la part des jeunes auteurs (une fois encore je ne parle pas des auteurs qui rapportent à leur maison et demandent une part légitime du gâteau). L'auteur du billet en question assure qu'il n'a pas voulu attaquer les éditeurs en faisant sa démonstration mais juste pointer le problème de l'économie sclérosée du livre (c'est bien résumé, Don ?).
Vous pouvez aller sur son blog http://lorenjy.wordpress.com/2010/03/01/le-fric-franco/#comment-2134 pour vous en faire une idée (ceci dit sans aucune ironie, je n'ai pas forcément le recul pour savoir comment ce post peut être perçu par chacun). 
Dans tous les cas, je ne renie pas l'article ci-dessus et je pense que tout jeune auteur devrait avoir conscience de la difficulté pour un éditeur de le lancer avant d'exposer ses exigences (et là, je ne te vise pas Don). 
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commentaires

C
<br /> Isa, je suis bien d'accord avec toi. Quand on voit le nombre de petits éditeurs qui se cassent la figure, je crois qu'ils méritent notre soutien, surtout en sachant la masse de travail qu'ils ont<br /> pour en effet "peanuts". Je pense aussi que si on veut gagner sa vie grâce à l'écriture, alors rien ne sert de cibler les petits éditeurs. Faut aller voir les plus grands... Ah mais oui, ceux-là ne<br /> donnent pas leur chance aux auteurs débutants. Dilemme... Accepter d'écrire par passion sans attendre ce qui ne peut attendu ou cesser d'écrire?<br /> <br /> <br />
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S
<br /> Bon... eh bien, je m'étais promise de ne pas me mêler de ce genre de polémique, mais je suppose que l'on ne se refait pas. C'est con, ça...<br /> Alors, en tant qu'auteur éditée par un éditeur, (pas petit l'éditeur, je précise) j'estime que si un auteur pense ne pas être assez payé pour ses textes ou pour le boulot qu'il effectue en relation<br /> avec ses écrits (corrections, remaniements, promos, séances de dédicaces et réunions diverses), il n'a qu'à changer de boulot, tout simplement.<br /> Je suis convaincue qu'être payée pour écrire est le pire boulot qui soit, cela va sans dire, n'est-ce pas...<br /> <br /> <br />
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I
<br /> Don Lo a dit "Toute ton analyse du milieu est sans doute pertinente (je ne sais pas, je ne connais pas bien, je débarque et de loin)."<br /> <br /> Je voudrais aussi réagir à ça. C'est peut-être parce que je connais ce milieu et ses difficultés que j'ai réagi avec une telle colère à ton billet (et non, je ne m'en cache pas). C'est facile de<br /> dire "Je ne gagne pas assez" sachant que tu le dis aux lecteurs de ton blog qui, pour la plupart, n'y connaissent rien à ce monde non plus.<br /> Et tu t'es trouvé sur assez de fils où on en cause pour connaître tout ça si tu le voulais : les interventions de J-C Dunyach sur les jeunes auteurs (JCD qui les soutient beaucoup, je le rappelle),<br /> les chiffres (*tous* les chiffres) donnés par les éditeurs dans les fils sur le numérique, etc...<br /> Depuis le premier jour où j'ai mis un orteil dans le monde de l'édition, j'ai assisté à l'éternel débat : est-ce l'auteur qui a besoin de l'éditeur ou l'inverse ? Et la question qui en découlait :<br /> lequel des deux a le droit de traiter l'autre de haut. L'idéal voudrait que personne ne traite personne de haut, mais il y a une chose qui est sûre c'est qu'en terme d'offre et de demande, la<br /> plupart des éditeurs ont une pile de manuscrits dont ils se passeraient bien. Je ne connais aucun auteur (débutant, s'entend) pour qui les éditeurs se battent. Et pourtant, j'ai vu bien plus<br /> souvent des auteurs attaquer les éditeurs que l'inverse. Est-ce parce que ce sont des "artistes" ? Je tends à penser que l'artiste a la chance de faire la partie agréable du travail (plus des<br /> corrections et des manifestations qui le sont moins) alors que l'éditeur se tape tout le boulot de paperasse bien frustrant. J'ajoute à ça que quand un écrivain perce, le public se souvient de lui,<br /> c'est lui qui accède à "l'immortalité" pas l'éditeur. Alors vu que l'éditeur fait tout le travail fastidieux, je trouverais ça logique qu'il soit payé en premier lieu. Et pourtant, une fois encore,<br /> ce n'est pas le cas. Quand un éditeur débutant lance des auteurs débutants, il les paie et ne se paie pas. Et une fois de plus, je le dis, je ne comprends pas pourquoi ils le font (surtout quand<br /> ils écrivent eux-mêmes et prennent ça sur leur temps d'écriture), mais je leur en suis reconnaissante.<br /> <br /> <br />
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D
<br /> OK, c'est bon, je me suis reconnu.<br /> Toute ton analyse du milieu est sans doute pertinente (je ne sais pas, je ne connais pas bien, je débarque et de loin).<br /> En revanche, dire que je tire sur qui que ce soit me paraît au mieux exagéré.<br /> Là où je ne regrette rien, c'est quand je vois que j'agace Draco. Un jour, elle me dira ce qu'elle me reproche.<br /> <br /> <br />
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I
<br /> Draco a l'honnêteté de le dire, Don Lo, c'est tout. Ça m'étonnerait qu'elle soit la seule à le penser.<br /> Quant à tirer sur les éditeurs : Dire que tu travailles comme un bagnard pour une misère alors que tu commences à peine à écrire, Don, c'est pas flatteur pour ceux qui t'emploient.<br /> Pour le reste, en lisant ton billet, je peux te dire que le sentiment qu'il en est ressorti est "On dirait vraiment que GdE sont des arnaqueurs de première et que Dumay se bat la couenne de ses<br /> auteurs". J'appelle ça "tirer." Et si je te le dis c'est que je ne suis ni Dumay ni GdE, justement. Je suis une auteur qui t'a déjà croisé sur les forums et a plusieurs fois vanté tes écrits. Donc<br /> neutre.<br /> Et pourtant c'est ce que j'ai lu, tu en fais ce que tu veux, maintenant.<br /> Mais si tu voulais dire "je gagne une misère parce que les libraires et distributeurs se servent gracieusement (et l'état)", fallait le dire comme ça, c'était le plus simple. Pas dire "GdE m'ont<br /> payé 30 euros pour une nouvelle" (tu ne précises pas "de cinq pages")puis "mais Bifrost m'en a donné 150, merci Bifrost". Tu ne mens pas dans les chiffres, tu oublies juste des données importantes.<br /> Comme de préciser que quand Gilles Dumay dit "le but avoué" il ne parle pas de son but à lui, mais de ceux qui sont au-dessus de lui et qui lui lient les mains (supérieurs qui, à mon avis, ont pas<br /> mal les mains liées aussi, de toute façon)<br /> <br /> <br />
N
<br /> Merci pour ce billet :)<br /> Le seul moyen pour qu'auteurs et petits éditeurs gagnent davantage, ce serait que davantage de gens lisent. Que les goûts des lecteurs les portent davantage vers ces textes de belle et bonne<br /> facture qu'on tente d'écrire ou de publier. Mais non. La vie secrète de tel "people", les confessions d'un artiste à la mode, la bio d'une gamine creuse un peu médiatisée ou les méthodes minceur<br /> dernier cri, voilà ce qui excite la foule, voilà ce qui occupe le terrain, voilà ce qui asphyxie tout le monde (et même les neurones des lecteurs, parfois).<br /> Ah, et si quelqu'un a envie de me crier dessus au prétexte que je mépriserais ce genre de "livres"... qu'il ne se gêne pas ! J'assume complètement.<br /> <br /> <br />
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  • isa
  • Isa, jeune auteur qui parle beaucoup avec les doigts (avatar ©Luis Royo)
  • Isa, jeune auteur qui parle beaucoup avec les doigts (avatar ©Luis Royo)

Paru !

http://www.griffedencre.fr/IMG/cache-200x307/PC_200-200x307.jpgMa première novella est enfin parue !

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Les premiers avis ici !

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